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voir de quoi il retourne dans sa caboche. Il y a des jours où tu dirais qu’il joue le jeu de ce pauvre M. Remy d’Arx[1]. Son idée paraît être de détruire les Habits-Noirs, mais on voit bien vite qu’il en sait long sur le Trésor et le reste. C’est un puits sans fond que cet homme-là. L’idée m’était venue une fois qu’il était le chef des Habits-Noirs lui-même. C’était absurde, puisque les Habits-Noirs l’auraient étranglé déjà s’ils avaient pu. Ça, j’en suis sûr.

La seule chose que M. Mora ne cache pas, c’est son amour pour Mlle Irène. Il est amoureux, mais là, aux petits oignons ! Il écrit des lettres et des pièces de vers, il chante des chansons en italien, mia cara, idol mio, delizie dell’ anima mia, tu dirais d’un ténor de café-concert. Et il l’est, ténor, avec une jolie voix douce comme du sucre, fondu dans de la fleur d’orange.

— Pourquoi, demanda Mme Canada, n’épouse-t-il pas la jeune personne ?

— Ah ! voilà… Il est comte ou marquis, ou même mieux par dessus sa chevalerie.

— Quel âge a-t-il ?

— Cherche ! C’est la blancheur du jeune premier, mais il y a pas mal de ratatinage. Et ça change selon les jours. Des fois, tu lui donnerais vingt-cinq

  1. L’Arme invisible et Maman Léo.