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L’abstraction qu’on fait de tout danger peut donner l’allure du calme au transport lui même.

L’idée de danger n’existait pas pour Vincent. Il allait à son but sans hésiter ni se détourner, comme le sanglier qui perce au bois.

— Ça me fâche de tuer quelqu’un, dit-il, mais que me veut celui-là ? Il est sans doute armé, je ne le suis pas. À la guerre comme à la guerre !

Ses deux mains saisirent le plomb dont son premier effort descella deux ou trois attaches. L’objet mouvant s’arrêta, et une voix dit tout bas :

— Père, n’ayez pas crainte, c’est moi.

— Qui, toi ? demanda Vincent.

— Reynier.

Vincent lâcha le plomb, et se mit à rire tout doucement.

— Il vient à mon secours, grommela-t-il ; ces enfant-là sont bien gênants. Il faut pourtant s’arranger de manière à ne pas lui faire trop de mal.

Il regarda au-dessous de lui tour à tour à droite et à gauche du mur.

À gauche, du côté du chantier, il y avait un tas de paille entre les perches dressées contre le mur et le pignon du pavillon Gaillaud.

Vincent secoua la tête d’un air satisfait.

— Père, dit Reynier qui approchait, vous êtes entouré d’ennemis. Je n’ai pas voulu vous laisser seul dans ce grand danger.