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Sa fièvre, sourde mais profonde, le tenait jusque dans les fibres les plus cachées de son être. Son cerveau, ivre d’or, délirait froidement. Il se baignait avec des angoisses voluptueuses dans ces océans de millions, où il aurait voulu mourir submergé.

Autour de lui, la nuit était jaune ; elle avait de mystérieux, d’amoureux tintements.

Il ne se pressa pas d’abord. La fenêtre qui était là, à portée de sa main, suffisait à sa quiétude. Il pensait :

— J’ai le temps. Une fois dans les rues, j’irai plus vite qu’une voiture au galop.

La mémoire du récit de maman Canada lui revenant, il dit encore :

— Le colonel a menti, il ment toujours. Comment serait-il possible de faire entrer le trésor dans une petit boîte ? Ce sont des contes à dormir debout.

Mais il s’interrompit pour se demander :

— S’il était mort pourtant ? Si tout cela était au-dessus de la nature ? Que ne peut-on faire avec des milliers de millions ?

Son rêve le berçait. Il ajouta :

— Et si je pouvais trouver la petite boîte où tiennent toutes ces richesses concentrées !

— Mais non ! fit-il avec une sorte de colère contre lui-même ; je cède aux entraînements de mon imagination. Ce n’est pas sage ; restons dans le vrai. Un