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ration populaire qui donne à la vérité même couleur de fantasmagorie, mais en dehors de sa faiblesse pour le merveilleux Parisien, qui est le mélodrame passé à l’état de mythologie, on doit confesser qu’elle avait par devers elle de terribles motifs de foi.

Elle avait vu déjà une fois les Habits-Noirs à l’œuvre ; le froid du couteau de l’association avait glacé sa gorge.

Là-bas, dans les oasis africaines, tous les animaux frémissent à la voix du lion, parce que le lion est le plus fort des animaux. La vraie vaillance n’existe que chez l’homme qui combat jusque dans sa faiblesse.

Maman Canada, amalgamant la légende avec l’histoire, accordait à ce qu’elle appelait le « fera-t-il jour demain » un pouvoir quasi surnaturel, et pourtant, à l’occasion, elle ne reculait pas devant cet épouvantail de ses rêves.

Elle avait ce grain de belle chevalerie qu’on retrouve encore dans le peuple, rarement, il est vrai, mais qu’on chercherait vainement ailleurs. Elle allait au combat, comme ces preux des temps poétiques, qui heurtaient volontiers à tout bout de champ, le fer de leur lance contre des cuirasses enchantées.

Ce danger, qui dépassait les bornes du croyable, l’attirait.