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« Mon cœur me dit que tu n’as jamais fait le mal. Tu ne m’as pas confié ton secret, mais ce n’est pas la justice qui te fait peur, j’en suis sûre. Tu parles toujours d’ennemis puissants. Je tremble qu’ils ne découvrent ta retraite.

« C’est là, père, que le danger serait terrible. Un crime doit être si aisément commis et caché dans ces ténèbres ! Mon cœur cesse de battre quand je songe à cela. Je te vois seul, sans défense. Elles sont si longues, ces froides galeries ! À qui demanderais-tu du secours ? Et ils n’auraient pas même besoin de creuser une fosse, puisqu’à chaque pas un abîme est ouvert… »

Ce passage de la lettre était fatigué et tout noirci par l’empreinte des mains de Vincent, qui avait dû la lire et la relire, les doigts encore chargés des souillures de son travail.

Irène leva les yeux sur lui. Elle pensait que le regard de son père la guettait pendant sa lecture.

Mais il n’en était pas ainsi. Les paupières de Vincent étaient fermées ; il s’était renversé sur le dossier du fauteuil.

N’eût été le mouvement de ses lèvres qu’il remuait avec lenteur et sans produire aucun son, on aurait pu croire qu’il dormait.

— Souffrez-vous mon père ? demanda la jeune fille inquiète, car il avait, en vérité l’air d’un mourant.

Vincent tressaillit et répondit :