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viens-tu du tableau ? Le souterrain où était le trésor, le vieillard et le jeune homme ? Bien des fois mes regards sont allés du visage de Reynier au visage du parricide. Et un jour, Reynier me dit lui-même : N’est-ce pas que je lui ressemble ?… Silence, ma fillette, il ne faut pas éveiller le destin qui dort !

Irène écoutait. Elle en savait assez pour entrevoir le sens caché sous ces paroles énigmatiques, mais elle ne les rapportait pas aux choses qui emplissaient et fatiguaient le cerveau malade de son père.

Pour elle, il ne s’agissait pas d’un tableau, mais d’un homme : de l’homme qui occupait incessamment sa pensée ; il s’agissait du cavalier Mora.

— C’est vrai qu’ils se ressemblent, murmura-t-elle.

Vincent Carpentier la regarda fixement.

— Tu es l’héritière, lui dit-il, par ton mari. Il est le dernier, le petit-fils. Coyatier m’a tout dit. Il sait de bizarres histoires, mais il ne sait pas où est le Trésor. Nous étions deux pour savoir où est le Trésor, LUI — et moi. — Il est mort, je suis seul.

Irène ouvrait la bouche pour dire : « Je n’ai pas de mari », et mettre fin à l’erreur où était son père.

Il lui imposa silence d’un geste plein de muette emphase et reprit :

— La volonté de Dieu est que le Trésor soit à moi. Sans cela pourquoi tant de miracles ? J’aurais dû mourir dix fois. Le Trésor a tué tous les autres. Coya-