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puissance véritablement surhumaine, c’est l’association.

Et l’association centuple à l’instant son pouvoir quand elle a dans la main cet instrument prodigieux qu’on nomme la subordination.

Aux jours où nous sommes, les États tremblent, les trônes chancellent, les peuples enfiévrés s’agitent dans d’inutiles convulsions, pourquoi ? Parce que chacun va de soi et pour soi contre tous, parce que l’individu n’a d’autre soin que de percer sa route au travers de la masse, parce que l’esprit d’antagonisme, qui est l’imbécillité, a pris le dessus partout sur l’esprit d’union, qui est l’intelligence.

Ils disent, du fond de leur aveuglement stupide : c’est la bataille de la vie.

Et ils vont leur chemin, culbutant celui-ci, culbutés par celui-là, laissant des vaincus couchés dans tous les fossés de la route.

Qu’arrive-t-il ? Dans ce trouble qui devrait être un ordre, au milieu de cette mêlée qui devrait être une paix, tout groupe associé, subordonné, défendu par une hiérarchie sincère, se dresse au sein même de la cohue comme ces bataillons carrés qui portaient aux confins de l’univers la conquête macédonienne.

Ces groupes sont phalanges ; ils savent unir des milliers de boucliers pour étendre autour d’eux une solide carapace. Ils vont serrés et bardés de toutes pièces dans la foule désunie et désarmée.