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Dès le point de départ j’aurais dû vous expliquer pourquoi je me suis permis, sans droit aucun, de jeter un regard sur votre vie, car c’est à cause de vous, uniquement à cause de vous, que je me suis occupée de votre père et aussi de votre fiancé, quoique je les connusse tous les deux avant de vous avoir jamais vue.

M’écoutez-vous ?

Irène dont le beau front rêvait répondit pourtant :

— Madame, je vous écoute.

— En vous voyant si merveilleusement belle, reprit la comtesse, si bien élevée, en un mot si fort au-dessus de la classe à laquelle vous paraissiez appartenir, j’éprouvai, à votre endroit un sentiment mélangé d’intérêt et de curiosité, dès la première fois que vous me rapportâtes une pièce de broderie. Le hasard seul nous avait rapprochées, vous simple ouvrière, moi, femme titrée et riche.

Elle s’interrompit parce que le regard d’Irène se relevait sur elle.

— Oui, je l’affirme, dit-elle, avec son sourire plein de franchise : le hasard seul. La sympathie n’est venue qu’après. Laissez-moi continuer. J’aime la fierté, il m’aurait déplu de vous inquiéter, de vous humilier peut-être en vous interrogeant directement. J’avais d’autres moyens de lire votre histoire à livre ouvert.