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L’entrevue avait un début bizarre. On dit que les diplomates jouent ainsi autour des questions qu’ils vont aborder.

La comtesse laissa retomber la feuille légère qui couvrit de nouveau la broderie et dit encore :

— Vous avez dû être bien privée quand votre piano vous a manqué ? Car vous êtes musicienne jusqu’au bout des ongles, je sais cela.

— Madame… commença Irène en rougissant un peu.

— Oh ! interrompit Marguerite, nous reviendrons à votre père, soyez tranquille. Je n’avais aucun droit à m’occuper de vous. Mais il y a des sympathies. J’ai pris mes premiers renseignements pour savoir si je puis vous être utile, j’entends plus utile qu’on ne l’est dans la mesure ordinaire, à une jeune personne qui travaille de ses mains, et le hasard a voulu que je sois tombée tout d’abord sur des faits qui mêlent votre histoire à la mienne.

Elle s’arrêta. Irène était immobile et droite sur son siège.

La lumière de la bougie les éclairait toutes les deux, charmantes au degré suprême, mais si différemment que la fantaisie d’un poète n’eût pu trouver un plus parfait contraste.

La physionomie de la comtesse était, comme sa parole, douce, affectueuse, mais gravement protectrice. Les traits d’Irène exprimaient un respect impa-