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terre. Malheureusement, tous tant que nous sommes, le tourbillon de la vie nous emporte, et nous n’avons plus le temps d’accomplir nos actes de piété envers les morts. Avez-vous reçu depuis peu des nouvelles de votre père ?

— De mon père ! répéta Irène ébahie. Vous ignorez donc, madame, que j’ai eu le malheur de perdre mon père ?

La comtesse lui prit la main et dit en baissant la voix :

— Il est vrai, mademoiselle, que je n’avais aucunement le droit de prendre des informations sur vous. J’aurais dû me contenter de ce que vous avez bien voulu me dire. Mais l’intérêt affectueux que vous m’avez inspiré est mon excuse.

La jeune fille resta sans réponse. Il y avait en elle du froid et je ne sais quel sentiment de défiance qui allait grandissant.

— Permettez-vous que je m’assoie ? demanda la comtesse.

Et comme Irène, confuse, entamait une apologie, Mme de Clare ajouta d’un ton simple et bon :

— Vous êtes étonnée, ne vous en défendez pas. Il paraît que je suis une grande dame, et les grandes dames n’ont pas coutume de rendre visite à leurs brodeuses. Si vous étiez couturière en renom, je ne dis pas. On peut dépenser une heure ou deux à polir