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y était blasé sur la paresse et la bombance. On ne dévalisait plus que par habitude et en quelque sorte par devoir d’état.

Il y avait six mois que le chef en chef, M. Hons, mieux payé, pourtant, qu’un colonel, n’avait paru dans les cuisines ; son secrétaire général, M. Teck, ne venait que tous les quinze jours, et M. Kopp, secrétaire de M. Teck, faisait faire sa besogne par un délégué, M. Hart, qui avait sous lui un maître cuisinier, M. Hof, lequel s’en reposait sur M. Spie, son aide. M. Spie avait un lieutenant, le seul français de la bande, travaillant ferme et mal payé parce qu’il était à la solde de l’invasion.

Ainsi du reste. Nulle parole ne saurait dire le dédain malveillant et universel de ces vainqueurs. Il n’y avait pas un marmiton qui ne regardât la marquise comme une créature d’espèce absolument inférieure. Ces charançons la dévoraient avec mépris, sans goût ; ils lui en voulaient pour cela, et ils l’insultaient la bouche pleine.

Rien n’est au-dessus de la langue poétique, qui peut tout dire, même la gloire des dieux ; mais la langue poétique est forcée de se donner aux chiens quand il s’agit de peindre les énormités de l’antichambre.

On se souvenait cependant d’une époque où les choses marchaient autrement chez la marquise. L’hôtel avait été tenu d’une main sévère au début du majordomat de M. le comte Giambattista Pernola. Szegelyi, le magnifique concierge valaque, disait que M. la comte avait maintenant ses raisons pour fermer les yeux. Il ajoutait :