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Laure, venez m’embrasser ! Comme vous arrivez tard ! C’est à peine si nous aurons le temps de causer un petit moment, car je ne sais pas où est Charlotte et je vais être obligée de descendre au salon pour recevoir mon monde. Et puis, je ne peux pas vous parler devant ces demoiselles qui n’en finissent pas, ma chère. Ce que j’ai à vous dire est si important ! Mon Dieu ! qu’un pareil secret est lourd à porter !

Laure se laissa embrasser, mais elle dit tout bas :

— Soyez prudente !

Comment exprimer cela ? Cette belle Laure était admirablement calme, et pourtant le repos de ses traits, la sérénité de son regard éveillaient je ne sais quelle vague impression de martyre.

Jamais elle n’avait été plus charmante, mais quelque chose effrayait et avertissait, à travers l’éclat de sa souveraine beauté.

Elle avait mis un peu de rouge : chose que personne n’avait jamais pu lui reprocher.

Et on eût dit que ce fard la faisait plus pâle.

Elle était bien pâle, en effet, mais l’erreur était en ceci que, sans son fard, elle eût paru livide.

Comme toujours, elle portait une toilette merveilleusement élégante et simple.

— Ah ! chérie, répondit Domenica, la prudence ! à qui le dites-vous ? Vous savez si mon habitude est de me comporter légèrement ! jamais je ne laisse rien voir de ce qui est en moi… Mais comment faites-vous pour trouver des mises si adorables ? Je crois que le choix de la toilette ne fait rien avec vous. C’est vous-même qui allez