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Ses cheveux blancs, éclatants comme un plat d’œufs à la neige, donnaient à ce petit homme une apparence tout à fait respectable.

Il faisait plaisir à voir.

Et le rédacteur du Constitutionnel eût été bien fier s’il avait pu surprendre un petit homme si propre et si joli dégustant sa prose éloquente avec une pareille volupté.

Nous vous l’avons présenté bien tard, ce petit homme, mais c’est qu’il ne vient guère qu’à la fin…

— Bonsoir, monsieur Morfil, dit auprès de lui une voix qui le fit sauter sur sa banquette.

Il se tourna vivement et vit à ses côtés un monsieur barbu qui lui souriait d’un air aimable.

— Ce doit être une méprise, dit-il poliment, je n’ai pas l’avantage…

Mais au lieu d’achever, il lâcha le Constitutionnel et s’écria :

— Tiens, Chanut ! pourquoi diable cette mascarade ?

— Parce que je suis mort, répondit Chanut, et même bien douloureusement : grillé dans un incendie.

— Pas possible ! Prenez-vous quelque chose ?

— Volontiers. Un peu de viande froide. Je n’ai rien mis sous ma dent depuis mon décès.

M. Morfil le regarda entre les deux yeux.

— Est-ce que c’est une affaire ? murmura-t-il.

— Ah ! mais oui, repartit Chanut : une belle ! Et qui dure depuis longtemps ! Vous étiez un rude galantin à cette époque-là, monsieur Morfil, et votre chef disait :