effet de lui avoir « pris son sang » quand il était tout jeune. On le nommait Yanuz.
Et comme sa gorge avait la trace d’une longue blessure, Pétraki et Phatmi, sa femme, étaient vus de mauvais œil par les gens du quartier.
Pétraki était la bonté même. Une fois, pourtant, la petite Éliane avait été battue parce qu’elle avait apporté à la maison son tablier plein de cerises : de ces belles cerises noires dont le jus est couleur de pourpre.
En la consolant, sa mère lui avait dit ces paroles singulières : « Ton père n’aime pas voir des cerises noires. C’est avec des cerises noires que Dieu nous a maudits. »
Elle ajouta :
— Yanuz nous tuera.
La maladie dont Éliane se mourait maintenant l’avait prise peu de temps après, et voici comme : Un jour qu’elle allait porter le dîner de son père, elle le vit de loin monté tout en haut de l’échelle. Son frère Yanuz était au pied qui secouait ; elle crut qu’il jouait, mais l’échelle tomba et Pétraki se tua.
Éliane sentit, en voyant cela, une douleur dans sa poitrine comme si son cœur éclatait.
L’enfant parricide s’enfuit. Phatmi, qui l’adorait, pleura la prunelle de ses yeux et devint aveugle.
À dater de ce moment, le malheur s’acharna, et Phatmi disait souvent :
— Dieu l’a pris le premier parce que j’étais la plus coupable.
Elle parlait de Pétraki, son mari.