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histoire qui nous fut contée d’abord par M.  Chanut lui-même chez capitaine Blunt.

Pour sa part, cette belle Laure nous en a fourni déjà deux versions dissemblables, dans chacune desquelles un atome de vérité se mêlait à des flots de mensonges.

Elle reprit :

— Le reste se peut dire en deux mots : dans l’intervalle, je m’étais mariée et j’étais devenue veuve. Maria, prise d’horreur pour son passé, se réfugia près de moi à Paris ; elle se croyait bien cachée, mais cet Antonio Arregui trouva sa trace, et Maria s’enfuit.

— Connaissez-vous sa retraite ?

— Je désire la connaître. Nous la chercherons ensemble. Quant à Antonio Arregui, je sais qu’il est retourné en Amérique.

— Ah ! fit M.  Chanut.

Laure ajouta :

— Il m’a écrit de San-Francisco.

Vincent rassembla aussitôt ses papiers et les remit dans sa poche, d’où il tira un volumineux calepin, lequel gardait à peine quelques pages blanches. Vincent choisit une de ces pages, mouilla sa mine de plomb, la suspendit en arrêt et dit :

— Madame la baronne, j’ai l’honneur de vous remercier. Veuillez me donner vos ordres, je vais prendre mes notes pendant que vous parlerez.

Depuis quelques minutes, Laure l’examinait avait un redoublement d’attention. Ce brave Vincent avait quand il voulait le plus parfait visage de bois qui se puisse imaginer. Nous ne dirons pas que sa physionomie ex-