vous, ni Pernola qui les avez appelés, ce doit être Mme la marquise.
— Je suis certaine du contraire, répliqua vivement Mlle d’Aleix. J’ai vu de mes yeux la profonde surprise de ma tante Domenica.
— Est-ce de mes tuteurs que, selon vous, me viendra le salut ? demanda le marquis. Vont-ils me faire enfermer sous bonne garde dans mon propre intérêt ?…
— Il n’y a, pour vous, qu’une bonne garde, interrompit Charlotte, c’est celle de votre fils.
Et comme M. de Sampierre la regardait d’un air sérieusement frappé, elle trouva des accents plus énergiques encore pour continuer :
— Prenez Domenico de Sampierre par la main, traversez le jardin, entrez dans le salon et dites à ceux qui sont là, à vos amis fidèles, venus de si loin, à votre femme presque veuve, dites-leur à tous : « Voici mon fils, j’étais fou parce que je croyais l’avoir tué ; son retour m’a rendu la raison ! »
Elle prononça ces paroles la tête haute ; il y avait une auréole de vaillance autour de son admirable beauté.
Les yeux ardents d’Édouard Blunt l’adoraient.
M. de Sampierre avait la tête haute aussi, mais ses paupières étaient baissées. Son grand front, où jouaient les boucles rares de ses cheveux blancs, semblait fait, en vérité, pour contenir tout un monde de pensées.
À le regarder mieux, cependant, il portait le signe indéfinissable et que chacun reconnaît : cet aspect dévasté des cerveaux vides.