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Et le fiacre s’ébranla.

Savta avait beaucoup voyagé en sa vie, obligée qu’elle était de suivre les pérégrinations continuelles des Sampierre. Elle portait généralement un petit sac de cuir de Hongrie qui contenait quelques provisions. C’est sage le long des routes. Aussitôt installée, elle ouvrit son sac et offrit une sandwich à sa jeune maîtresse, en disant :

— Mangez une bouchée, amour ; ainsi vos heures ne seront pas changées.

Sur le refus de Mlle d’Aleix, elle mangea elle-même une bouchée, composée de la sandwich offerte et d’une seconde. Après quoi le fond du sac lui fournit une bouteille revêtue d’osier, où elle puisa, non sans faire observer que :

— De ne pas boire après le repas, c’est dangereux pour l’estomac.

Lestée de cette sorte, elle monta courageusement, derrière Mlle d’Aleix, le long et raide escalier qui conduisait à l’appartement de M. Chanut, mais ce ne fut pas sans dire plusieurs fois :

— Ceux qui ne connaissent pas les fourmis dans les mollets sont bien heureux !

Mme Chanut, la mère, était seule à la maison. Elle fit entrer les deux visiteuses dans cette chambre si proprette et si bien tenue où la bonne dame avait reçu capitaine Blunt.

Mme Chanut ne se donnait pas à tout le monde. Les femmes comme elle qui ont vécu de peines et de frayeurs ont beau avoir le cœur doux et même grand, elles sont