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Le bruit d’un cordon qu’on tirait se fit entendre, et la porte s’ouvrit.

Le Poussah était assis, en manches de chemise, à sa place ordinaire, en face de la fenêtre ouverte. Il avait devant lui une soupière vide et sa vaste cruche de bière, flanquée d’un verre où restait la mousse de la dernière rasade.

Entre la porte et lui, le gros chien Tonneau, calé sur ses quatre pattes écartées, grognait et montrait les dents.

— À bas, Tonneau ! dit le père Preux qui repassait un rasoir sur le creux de sa main, sois galant avec les dames, bonhomme. Une, deux ! montrez vos talents !

Tonneau, toujours grognant, se leva sur ses pattes de derrière, ne put garder l’équilibre et retomba lourdement. Le père Preux, humilié, lui lança un vieil almanach Bottin qui était toute sa bibliothèque, et Tonneau regagna son trou derrière le lit en rampant.

Charlotte avait fait un pas à l’intérieur de la chambre. Savta restait contre la porte, étonnée et effrayée. C’était le chien surtout qui lui faisait peur.

— Ah ! ah ! reprit le Poussah avec la plus aimable familiarité, vous avez votre dame d’honneur aujourd’hui, ma princesse ? Asseyez-vous donc et la confidente aussi. Vous permettez que je continue ? Je vais avoir une rude journée de travail !

Charlotte montra une chaise à Savta qui s’assit, mais elle-même resta debout.

Le père Preux barbouilla de savon ses grosses joues.