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écouter. Ce n’est ni la même main, ni la même pensée…

Et avec une extrême lenteur, elle lut, l’œil fixé dans le vide :

« Entre mille, quand il passera, vous le reconnaîtrez à sa tête qui penche… »

— C’est cela ! s’écria la marquise en rouvrant la lettre, textuellement cela !

« Et alors, continua Laure, toujours lisant, demandez-lui pourquoi sa tête est ainsi inclinée. Ce qu’il vous montrera ressuscitera pour vous l’heure terrible qui est morte depuis vingt ans… »

— C’est cela ! répéta Domenica, c’est le post-scriptum tout entier !

— Silence ! fit Laure.

C’était vraiment une belle comédienne. Elle avait attaché sur son visage le masque désespéré de la Sibylle forçant les secrets de Dieu.

— C’est moi qui veux savoir ! reprit-elle après un silence. Je cherche Domenico de Sampierre. Je veux le voir !… Je l’aperçois, je l’atteins… quelle puissance décevante m’en avait donc montré un autre ?…

Domenica n’osait plus bouger. Et en effet, ce n’était point pour elle que Laure semblait parler désormais. En apparence, Laure ne savait même pas que quelqu’un restait auprès d’elle. Tout entière à sa tâche épuisante, elle luttait corps à corps avec le mystère.

— Oui… oui, fit-elle d’une voix qui n’était plus la sienne et que sa compagne écoutait avec d’avides terreurs, c’est lui ! l’enfant que la mort guettait à l’heure de sa naissance !… mais l’autre, alors ?… Ils sont deux ;