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— Quand je parle, il faut répondre ma petite, prononça Domenica majestueusement.

Laure murmura enfin :

— Ce que je ne vois pas, je ne puis le dire.

— Voyez-vous la lettre ?

— Oui, je vois la lettre.

— Comment finit-elle ?

— Par le mot « présence. »

— Et il n’y a rien après ?

La baronne hésita visiblement.

Domenica tenait dans sa main la lettre ouverte.

Je ne sais ici où trouver des mots pour exprimer ce fait d’une prunelle complètement immobile et qui, pourtant, projette de côté un regard perçant, subtil, rapide comme la langue bisaiguë d’un serpent.

Et cet autre fait d’une émotion violente, trahie par la joue de marbre d’une statue qui représenterait l’impassibilité.

Ce n’est pas possible, peut-être, mais cela fut.

Pendant le quart d’une seconde, la fixité du regard de Laure laissa sourdre un rayon qui n’allait pas dans le sens apparent de la vision.

Et son visage pétrifié se tourmenta sous l’effort d’un travail profond, qui n’en affectait en rien matériellement les contours ni les lignes, mais qui se laissait deviner derrière le repos apparent de la chair.

Quand elle parla enfin, ce fut de même ; dans sa voix dont le caractère général restait la roideur, brève et sèche, une angoisse irritée vibrait.

— Je vois la phrase ainsi, dit-elle : « Préparez-vous,