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LES BELLES-DE-NUIT.

profil de la façade intérieure de la prison, c’est-à-dire quelques barreaux de fer, faisant saillie hors de l’épaisse muraille.

Mais, à cause de cette position même, si elle ne pouvait rien voir, elle pouvait être vue.

Et, de fait, derrière une de ces croisées, que défendait un solide grillage, il y avait un prisonnier dont les yeux restaient fixés sur elle durant une grande partie du jour.

Une ou deux fois, Blanche l’avait entrevu aux rares instants où le soleil, pénétrant dans la ruelle intérieure de la prison, éclairait d’aplomb son visage. Mais elle n’avait pu distinguer ses traits, parce qu’il y avait les barreaux de fer entre le prisonnier et son regard.

D’ailleurs, elle n’avait point l’esprit assez libre pour se donner à une curiosité vaine.

Comme son âme était bonne, elle priait parfois pour le pauvre prisonnier. C’était tout.

Le prisonnier, au contraire, s’occupait d’elle sans cesse.

Il avait en sa possession la lame d’un couteau qui, ébréchée, lui servait à limer ses barreaux. Toutes les heures de sa nuit se passaient à ce patient travail ; mais dès que s’ouvrait la croisée de Blanche, il ne travaillait plus, sa tête s’avançait, avide, et il semblait que son âme s’élançait vers la jeune fille.