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LES BELLES-DE-NUIT.

du premier consolateur qui s’était offert, et dans tout le bal on n’eût point trouvé de danseuses plus allègres et plus folâtres.

Tel est le charmant caractère de ces dames. Fi de la mélancolie ! Est-ce pour pleurer qu’on aime ?…

Le seul malheur en ce monde, c’est de sentir sa taille s’affaisser, son jarret mollir ; de voir branler la première dent, de découvrir dans le jais ondé d’une belle chevelure ce fil d’argent qui brille et qui menace.

C’est l’âge impitoyable, cet escalier que chacun descend, dont les premières marches sont d’or, et dont les derniers degrés se perdent hélas ! si bas, qu’on n’ose presque le dire…

Le temps marche, et ces dames ne sont que les locataires de leur opulence. Ont-elles même un bail ? Ces moelleux tapis que foulent leurs pieds mignons, les hautes draperies de brocart qui entourent ce beau lit sculpté, ces meubles merveilleux, ces cachemires, ces parures, tout cela les quittera un jour.

Mouiller de pauvres brodequins dans la boue du trottoir, quand on s’est étendue, si gracieuse et si fière, sur les coussins d’un noble équipage !

Oh ! c’est là le malheur ! le malheur odieux, inévitable !

S’il est loin encore, tant mieux ! il faut rire.