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LES BELLES-DE-NUIT.

ploi, n’importe quel emploi, et n’en pouvant trouver nulle part.

Marthe et son mari n’essayaient même pas. Madame se courbait, anéantie, sous le poids de sa douleur de mère. Elle n’avait plus ni volonté ni force. Parfois, elle restait du matin au soir accroupie dans la poussière, à l’endroit où nous la voyons maintenant, sans bouger, sans parler. D’autres fois elle sortait furtivement, dès l’aube. C’était pour aller au loin, dans Paris inconnu, tant que ses pauvres jambes pouvaient la porter ; c’était pour chercher sa fille…

Les gens du quartier la regardaient comme une folle.

René, lui, buvait le plus qu’il pouvait. Dès qu’il n’avait plus de quoi boire, il tombait dans une apathie morne.

Il se passait des semaines sans qu’une parole sortît de ses lèvres.

Chaque soir, il quittait son soliveau, et allait disputer au vieux Géraud malade une part de son matelas.

Marthe et l’oncle Jean couchaient sur la terre.

Tant qu’il était resté un peu d’argent à Diane et à Cyprienne, elles avaient fait passer chaque jour leur petite offrande par les trous de la cloison. Plus tard ç’avait été du pain, le pain dont elles manquaient elles-mêmes !