Page:Féval - Les Belles-de-nuit ou les Anges de la famille, tome 3, 1850.djvu/83

Cette page a été validée par deux contributeurs.
81
CHAPITRE XIX.

pace de trois années consécutives, j’aurai la libre disposition de notre fortune indivise, parce que, suivant nos conventions, je serai le maître, et toi le domestique.

Robert le regarda bouche béante.

— Tu veux railler ? balbutia-t-il.

— Non pas du tout !… de ma vie je n’ai parlé plus sérieusement !… Mon brave, il n’y a dans les marchés que ce qu’on y met… Le soir où nous fîmes ce bon repas à l’auberge du vieux Géraud sur le port de Redon, — quelle omelette ! mon bonhomme… et quel gigot !… non, c’était une épaule, — tu me promis en propres termes d’être mon domestique pendant le même espace de temps que je t’aurais servi…

— Et tu es assez fou pour espérer… ? commença Robert en fronçant le sourcil.

— Une simple observation…, interrompit l’Endormeur avec gravité : les rapports nouveaux que nous allons avoir ensemble exigent, à mon avis, de nouvelles formes… S’il m’en souvient bien, tu exigeas de moi autrefois le sacrifice de certaines façons familières… aujourd’hui je te rends la pareille, et franchement tu ne peux pas m’en vouloir…

Robert avait grand’peine à contenir son impatience.

— Quand tu auras fini…, dit-il.