Page:Féval - Les Belles-de-nuit ou les Anges de la famille, tome 3, 1850.djvu/72

Cette page a été validée par deux contributeurs.
70
LES BELLES-DE-NUIT.

me voir rentrer dans la maison de mon père !

— Et bien ils feront, mon neveu ! s’écria le vieil oncle en affectant un espoir qu’il n’avait pas ; car Dieu est juste, et vous y rentrerez quelque jour… En attendant, je vois de la lumière dans la loge de Benoît le passeur… Entrons là pour laisser passer l’orage, car la pauvre Marthe est bien faible… J’ai bonne espérance… Quand Marthe sera reposée, nous prendrons le bac et nous irons chez notre ami Géraud, qui est riche et dévoué…

L’oncle Jean marchait maintenant le premier. Il s’engagea dans le petit sentier qui menait à la loge. René le suivait avec répugnance. Depuis plus d’une année, il n’avait pas visité le vieux serviteur de son père, qui se mourait dans l’abandon.

Comme Jean de Penhoël approchait de la cabane, il vit en travers de la porte une masse noire dont il ne distinguait point la forme.

Au bruit de ses pas, la masse noire remua. C’était un homme, assis sur la pierre du seuil, la tête entre ses deux mains.

— Est-ce toi, vieux Benoît ? demanda l’oncle Jean.

L’homme releva la tête, et l’oncle Jean put reconnaître la bonne figure de l’aubergiste de Redon.