Page:Féval - Les Belles-de-nuit ou les Anges de la famille, tome 3, 1850.djvu/42

Cette page a été validée par deux contributeurs.
40
LES BELLES-DE-NUIT.

Son cœur, qui recommençait à battre, avait envoyé un peu de sang à sa joue ; ses yeux retrouvaient des larmes ; ses grands cheveux blonds, dénoués, inondaient son visage et tombaient jusque sur ses épaules.

René se prit à la contempler tout à coup en silence. Sa physionomie changea. Quand il prit enfin la parole, il y avait dans sa voix une émotion triste et presque tendre.

— Oh ! je sais bien que vous êtes belle !… dit-il ; si vous aviez voulu, nous aurions été bien heureux… Je ne demandais qu’à vous aimer en esclave, Marthe… Vous souvenez-vous ?… Il y a longtemps !… Mais moi, je n’ai point oublié comme mon cœur battait à votre vue… Depuis, une autre femme m’a pris mon cœur et ma raison… Lola… qui est bien belle aussi !… Lola, qui m’abandonne lâchement à l’heure où je souffre !… Mais ce n’était pas le même amour… Oh ! non… En ma vie je n’ai aimé que vous, Marthe, et je n’aimerai que vous !…

Il se rassit à côté de Madame et prit à deux mains ses beaux cheveux pour les ramener en arrière.

— Vous souvenez-vous, continua-t-il, de mes prières et de mes larmes ?… Je ne savais pas tout mon malheur, mais je sentais qu’on ne m’aimait