Page:Féval - Les Belles-de-nuit ou les Anges de la famille, tome 3, 1850.djvu/37

Cette page a été validée par deux contributeurs.
35
CHAPITRE XVII.

« Mais ils étaient tous contre moi… votre père et votre mère… Ils me disaient, à moi, pauvre fille, recueillie au manoir dès mon enfance, et vivant de leurs bienfaits, ils me disaient : « N’êtes-vous entrée dans notre maison que pour la perte et le malheur de nos deux fils ?… Louis est parti à cause de vous… et voici notre René qui se meurt pour vous ! »

« C’était vrai, mon Dieu ! si vous aviez vu René comme il était changé ! Il restait des semaines entières seul dans sa chambre ; il ne voulait plus s’asseoir à la table commune. Il parlait de se tuer. Le commandant et madame, qui m’a servi de mère, me disaient, les larmes aux yeux : « Oh ! Marthe ! Marthe ! sa vie est entre vos mains. Ayez pitié, au nom de Dieu, et gardez-nous notre dernier enfant ! »

« S’il n’avait fallu que mon sang pour le sauver !… Mais je ne pouvais pas… Vous savez bien que je ne pouvais pas !… »

Les lèvres de René grimacèrent un sourire.

— Oh ! oui… murmura-t-il, mon généreux frère savait cela, madame… et quand il est revenu, trois ans après, il vous a donné sans doute l’absolution de votre crime !…

— Revenu ? répéta Marthe étonnée.