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CHAPITRE III.

ce qu’ils feraient si leurs regards tombaient sur nous, pauvres filles…

— Ils nous reconnaîtraient, ma sœur…

— Peut-être ; car nous n’avons encore que deux mois de misère… Mais leur voiture s’arrêterait-elle ?… les verrions-nous descendre et accourir vers nous ?

Diane ne répondit point.

Cyprienne souriait amèrement.

— Chanteuses de rues ! murmura-t-elle ; j’ai froid jusqu’au fond de mon cœur quand je songe à ce que je souffrirais si Roger détournait la tête après m’avoir aperçue…

— Il ne le ferait pas !… répliqua Diane ; je suis sûre de lui comme d’Étienne… Tout notre malheur est de ne pouvoir les joindre !… Si nous nous étions montrées à eux dans la diligence, en arrivant à Paris, notre sort aurait bien changé !…

— N’auraient-ils pas dû nous deviner ?

— Ils ne savaient rien… Ils nous croyaient encore à Penhoël… Oh ! ce fut notre première douleur, dans ce Paris où nous devions tant souffrir, quand nous nous vîmes seules au rendez-vous, devant les grandes tours noires de Notre-Dame !… Te souviens-tu comme nous étions tristes après avoir espéré gaiement toute la journée ?…