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LES BELLES-DE-NUIT.

lieu du monotone coup d’œil, l’horizon, soudainement élargi, montrait l’admirable paysage au milieu duquel s’assied la vieille ville de Vitré.

Il y avait de quoi ravir un peintre. On inventerait difficilement un tableau plus frappant. Étienne regardait avec des yeux charmés ces maisons de style bizarre jetées pêle-mêle sur le penchant de la colline et s’ameutant pour ainsi dire autour de la grande masse du château. Il lui semblait voir une fantasque danse de pignons antiques et de toits aigus, découpés comme des pièces d’orfévrerie. Le vent chassait les nuages au ciel. Quand un rayon de soleil venait à percer tout à coup, c’était une étrange vie parmi ces masures dix fois séculaires qui grimpaient, serrées et en désordre, aux flancs rocheux de la montagne.

L’œil se perdait à vouloir suivre les innombrables détails du tableau. Depuis la belle prairie ou serpentait la Vilaine jusqu’au sommet lointain de la rampe, c’était comme un grand perron aux marches inégales et formées de constructions qui chancelaient de vieillesse. Tout en bas, au-dessus du moulin dont la roue jetait un cri monotone, une cabane s’élevait avec sa toiture de chaume ; sur la cabane s’appuyait la maison d’un bourgeois vitriais, entourée d’un porche branlant ; sur la maison se dressait un