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LES BELLES-DE-NUIT.

une petite valise assez plate, et demandant une place pour Paris.

En pleine rue, on ne se fût certes pas arrêté pour ouïr les instances de ce voyageur inconnu, mais sous l’étroite voûte qui sépare la voie publique de la cour des messageries rennaises, un seul homme fait obstacle et peut disputer le passage au postillon le plus absolu. Il faut parlementer.

Le conducteur se pencha sur son siége et dit :

— Monsieur, la voiture a sa charge… Après-demain, vous aurez un autre départ.

Le voyageur n’était rien moins que notre ami Étienne Moreau, le peintre, arrivant de Redon avec son léger bagage.

— Il faut pourtant que je parte aujourd’hui…, répliqua-t-il.

— S’il n’y a pas de place.

— Je ne suis pas difficile… je me mettrai n’importe où.

— Voilà un être entêté !… grommela le conducteur ; puisque je vous dis que la diligence est comble !… Adressez-vous en face à la Concurrence… Il n’y a pas de danger qu’on refuse un voyageur dans cette boutique-là !

— J’en viens pourtant, dit Étienne ; et l’on m’a refusé.