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Elle ajouta en essayant de donner à sa voix un accent de plaisanterie :

— On dirait que vous vous croyez dans quelqu’un de ces vieux châteaux où les félons chevaliers de vos romans enchaînent et torturent de pauvres victimes…

— Nous vous voyons si souvent pleurer !… interrompit Diane.

Madame retira sa main.

— Vous êtes curieuses, mes filles, dit-elle avec sécheresse, et je trouve que vous voyez trop de choses !

Cyprienne rougit, blessée. Le front de Diane devint pâle.

— Il faut nous pardonner, dit-elle d’un ton soumis ; quand vous êtes triste, il nous semble que votre souffrance est à nous… Ah ! que n’êtes-vous heureuse, madame ! nous vous laisserions tout votre bonheur !…

L’émotion commença à percer sous la froideur de Marthe ; son regard glissa, malgré elle, entre ses paupières demi-closes, et partagea entre les deux jeunes filles une œillade furtive.

Diane et Cyprienne n’osaient point relever les yeux. Le joli front de Cyprienne se teignait encore de ce rouge vif qui monte du cœur froissé au visage. La figure de Diane n’exprimait que respect et douceur. Mais quelle que fût la diffé-