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Que Marthe préférât son enfant à elles, on ne pouvait s’en étonner, mais elle aimait l’oncle Jean ; pourquoi ce front sévère et glacé chaque fois que les filles du bon vieillard s’approchaient d’elle ?

Ce ne pouvait être un pur caprice. Les bonnes langues de la société disaient bien que Madame était jalouse et qu’elle enrageait, suivant l’expression des trois Grâces Baboin, de voir les petites mendiantes surpasser en beauté l’héritière de Penhoël. Mais le moyen de soupçonner un sentiment si bas dans l’âme haute et digne de Marthe !…

Il y avait de quoi, pourtant, être jalouse. L’Ange de Penhoël méritait bien son nom. Impossible de rêver une figure plus virginale et plus céleste. Mais, dans la régularité même de ce visage exquis, un peu de monotonie s’engendrait. L’ensemble de ses traits mignons révélait une langueur paresseuse qui se retrouvait dans la démarche, dans la pose, partout. Le piquant, d’ailleurs, pouvait manquer à sa physionomie trop douce, dont les lignes se fondaient, effacées, sous les masses de cette chevelure blonde, pâle et presque divine auréole qui donnait au front de l’enfant une sérénité uniforme et inaltérable.

Chez les filles de l’oncle Jean, au contraire,