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déjà trop pour mêler Roger ou Étienne à ces sourdes batailles où il s’agissait de mort.

Et, eussent-elles aimé cent fois davantage, l’idée ne leur serait point venue d’abandonner la tâche commencée.

D’ailleurs, il y avait des moments où elles espéraient la victoire. Et que de joie alors ! Avoir sauvé le maître qui avait été bon pour leur enfance et qui donnait sa maison à leur vieux père sans asile ! Avoir sauvé Madame qui se mourait à souffrir d’une angoisse inconnue, Madame, leur profond et tendre amour ! Avoir sauvé Blanche enfin, la pauvre enfant, le doux ange de Penhoël, sur qui planait aussi la menace commune !

Quand ces espoirs venaient, elles ne voyaient plus le monceau d’obstacles qu’il fallait soulever, et leur cœur, ivre, bondissait d’allégresse par avance.

C’était cela qui les soutenait. Le courage, si grand qu’on pût le supposer, n’aurait point suffi ; il fallait les illusions et l’espérance.

Et ici leur ignorance complète de la vie, et la simplicité qui leur montrait au loin une route ouverte au travers de l’impossible, étaient puissamment aidées par la nature romanesque de leur esprit.

Tout, depuis leur enfance, avait accru cette