Page:Féval - Les Belles-de-nuit ou les Anges de la famille, tome 2, 1850.djvu/47

Cette page a été validée par deux contributeurs.

qui est plus étrange encore !… Quand je m’éveillai enfin, je ne saurais trop dire si c’était la suite de mon rêve… je crus voir véritablement un homme qui s’enfuyait sous la charmille…

— Et tu le reconnus ?… demanda Marthe d’une voix sourde.

— Non… seulement, comme je retournais au château, je rencontrai sur mon chemin M. Robert de Blois…

— Robert de Blois !… répéta Madame, dont l’œil étincela d’un feu sombre.

— C’est étonnant, n’est-ce pas ? dit encore Blanche, dont la paupière s’ouvrit à demi pour se fermer aussitôt.

Son souffle se fit entendre régulier et plus bruyant.

Elle dormait.

Mais elle en avait dit assez ; Marthe de Penhoël n’avait plus rien à apprendre.

Un instant elle demeura comme atterrée ; puis, par un mouvement instinctif et violent, sa main tremblante tâta et pressa les flancs de l’Ange qui gémit dans son sommeil.

— Perdue !… dit-elle prononçant pour la première fois ce mot qui était depuis si longtemps au fond de sa pensée ; perdue comme moi !… innocente comme moi !… Qu’ai-je fait, mon Dieu ! pour être punie jusque dans mon enfant ?