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— Vous leur aviez tout pris, vous !… leur place dans le monde… leur héritage… jusqu’au sourire de leur mère !…

Une larme vint mouiller les cils baissés de Blanche qui rêvait. La tête de Madame se pencha sur sa poitrine.

— Jusqu’au dernier jour !… reprit-elle ; oh !… il m’a fallu rester auprès de votre lit, tandis que des étrangers jetaient la terre bénite sur leur tombe !… Abandonnées !… abandonnées depuis le berceau jusqu’à la mort !…

Elle se couvrit le visage de ses mains et garda le silence durant quelques minutes ; puis, se redressant tout à coup, elle dit avec un élan de passion :

— Après la mort, du moins, on peut les aimer, je pense !… Dormez heureuse, Blanche de Penhoël… Pour la première fois, je vais vous abandonner, ma fille, afin de prier pour elles !…

Marthe oublia de mettre un baiser sur le front de sa fille. Elle traversa la chambre à pas lents et s’engagea dans les corridors du manoir, après avoir fermé la porte à double tour.

Elle ne rencontra ni valets ni maître sur son chemin. La maison semblait déserte.

Une fois dehors, elle pressa le pas pour se diriger vers la paroisse de Glénac, qui était distante d’un grand quart de lieue.