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Les métayers se rapprochèrent curieusement. Mais le vieux Géraud n’en voulait point dire davantage.

— C’est moi qui lui ai montré le chemin du manoir ! répéta-t-il, comme si cette idée l’eût poursuivi sans cesse ; c’est moi !… Écoutez !… avant de monter jusqu’à la ferme, je suis entré tantôt chez Benoît Haligan, qui est bien près de mourir… car tous ceux qui aiment Penhoël s’en vont les uns après les autres !… le pauvre Benoît a le grolet[1] sur sa paillasse. Ce n’est pas d’hier qu’il a dit pour la première fois que l’Ange et les deux filles de Jean de Penhoël feraient trois pauvres belles-de-nuit, avant le déris de l’hiver qui vient… Il m’a dit encore, poursuivit le père Géraud en baissant la voix davantage, que notre M. Louis reviendrait quelque jour… mais qu’il reviendrait trop tard !

Le père Géraud se tut, et il se fit un silence autour de lui.

Chacun avait le cœur serré. Cette fête, commencée dans la joie, s’achevait morne et lugubre.

La plupart des paysans rassemblés dans l’aire n’avaient pas donné grande attention jusqu’alors

  1. Le râle de la mort.