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de cheveux noirs et plats, lui avait fait donner par le père Chauvette le sobriquet scientifique de Macrocéphale, et chaque fois que le bon maître d’école se livrait à cette plaisanterie, il ajoutait en manière de note : « Genre d’insectes coléoptères, dont le nom est tiré du grec et qui ont la tête longue comme M. le Hivain… »

La table, dressée entre les quatre joueurs, supportait, outre les cartes et les chandelles de suif, cinq petits paniers remplis de fiches et une pancarte imprimée contenant les règles du boston de Fontainebleau.

L’autre angle de la cheminée était occupé par un groupe plus nombreux où dominait l’élément féminin. Tout auprès du foyer, une femme, jeune encore, et dont le visage régulièrement beau avait un caractère de douce dignité, s’asseyait renversée dans une immense bergère à ramages. Elle tenait entre ses bras une jeune fille de douze ans, dont la tête blonde s’appuyait sur son sein.

C’étaient la vicomtesse Marthe de Penhoël et sa fille Blanche, que les bonnes gens du pays entre Carentoir et Redon avaient surnommée l’Ange.

Les hommes de la campagne sont poëtes. On disait que l’Ange de Penhoël était trop bonne et trop jolie pour cette terre, et que Dieu la voudrait bientôt dans son paradis…