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répliqua Robert ; et même de beaucoup plus loin… Le but de mon voyage est de visiter un gentilhomme de vos environs que je ne connais pas du tout personnellement, et au sujet duquel je serais bien aise de prendre langue à l’avance.

Cette phrase, malgré sa simplicité apparente, était de celles qui sonnent toujours mal aux oreilles bretonnes. En ce temps-là, comme avant et depuis, il y avait force dissidences politiques dans la province ; or, partout où la guerre civile a passé, le questionneur curieux prend volontiers physionomie d’espion.

Le petit œil gris du père Géraud se baissa, tandis qu’il murmurait son prudent :

— Ah ! ah !…

— Les détails que je demande, reprit l’Américain, sont en définitive peu de chose, car je sais d’avance que la famille de Penhoël est riche et respectable…

— Oh ! oh !… fit le bonhomme avec une certaine emphase ; il s’agit des Penhoël ?…

— Un message que j’ai pour le vicomte, et qui m’a fait prendre par Redon au lieu d’aller tout droit à Nantes… Y a-t-il loin d’ici à Penhoël ?

— Un bon bout de chemin, répliqua le père Géraud.

— Et… le vicomte est-il aussi galant homme qu’on le dit ?