Page:Féval - Les Belles-de-nuit ou les Anges de la famille, tome 1, 1850.djvu/210

Cette page a été validée par deux contributeurs.

pavé de London-Bridge, tant la foule des badauds était drue !

Au moment où l’eau de la Tamise se blanchit sous les premiers tours des roues, il y eut de chaudes acclamations.

On saluait à la fois le premier steamer, affrontant les périls de l’Océan, et le roi des nababs !

Berry Montalt était entré avec sa compagne sous la tente de cachemire qui occupait l’arrière de l’Érèbe. Le navire s’ébranla. On aperçut durant quelques instants encore la noire crinière de fumée, déroulant au soleil ses masses changeantes, puis tout disparut dans la direction de Greenwich.

Londres était veuf de son nabab cher, et retombait en proie à lord Chesterfield, au marquis de Waterford et à tous ces pauvres seigneurs qui se damnent, depuis des siècles, avec une tristesse héroïque, rossant le guet toujours, arrachant les marteaux des portes, ne se lassant jamais de boxer les porteurs de charbon et de boire en bâillant des tonneaux de xérès.

. . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . .

Il y avait quarante-huit heures que les matelots de l’Érèbe avaient perdu de vue les tours jumelles de Westminster ; aucun accident n’avait signalé jusqu’alors le voyage ; malgré les