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À son tour, il jeta son couteau.

— Usée à l’endroit du rivet ! murmura-t-il. Mais comment se fait-il que je n’aie pas senti que le poids me manquait… j’ai senti ! je m’en souviens ! dans le salon de verdure ! et j’ai tiré sur la chaîne qui a résisté.

Il donna une violente saccade à l’autre bout de la chaîne qui vint en déchirant l’étoffe de sa soutanelle.

— Une paille ! balbutia-t-il ; et l’anneau brisé engagé dans le drap de mon vêtement !

William prit la chaîne à son tour, pendant que Bobby fermait les poings et disait l’écume à la bouche :

— J’ai acheté cette chaîne à Francfort-sur-le-Mein, au numéro 3 de la Zeil. Je ferai le voyage de Francfort tout exprès pour arracher le cœur du marchand !

Ils se connaissaient trop bien pour qu’il leur fût possible de se tromper mutuellement. Ni l’un ni l’autre ne gardait de soupçon vis-à-vis de ce muet témoin : la chaîne brisée. Ce premier moment était tout entier à la consternation.

William mit un bout de la chaîne sous son talon et tira l’autre à deux mains de toute sa force : la chaîne résista.

— Il n’y avait qu’une paille…, murmura-t-il.

Son portefeuille était sur la table, tout prêt pour vérifier le compte. Il l’ouvrit, et se prit à lire d’une voix éteinte :

— Deux bank-notes de cinquante mille livres… N° 1… Deux millions cinq cent mille francs !

— La banque d’Angleterre n’a tiré que cinq exemplaires de la planche, soupira Bobby, et nous en avions deux.

— N° 2, poursuivit le grand, deux bank-notes de mille livres… N° 3, deux bank-notes de mille livres… N° 4, deux bank-notes de mille livres…

— Il y en avait cent ! interrompit Bobby, cent comme cela !

— Encore deux millions cinq cent mille francs !… N° 102, deux bank-notes de cinq mille livres… c’est