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qua mon père. Mélise, va nous chercher du vin.

Il fallut obéir. Je ne sais ce qui fut dit pendant mon absence. Au moment où je rentrai, mon père s’écriait :

— C’est étonnant, mon camarade ! il me semble que je vous ai déjà vu quelque part !

— Il se peut, dit le More, si vous avez voyagé au loin. Moi, c’est la première fois que je viens à Paris.

— Ce jeune homme dont vous parlez, reprit mon père en versant le vin dans les tasses, ne s’appelait-il point Renaud de son nom de baptême ?

Pola qui, désormais écoutait avidement, demanda :

Penses-tu que mon frère aîné soit vivant !

— Je ne pense rien, chérie, répliqua Mélise. L’espoir trompé est une douleur, et Dieu sait que la bonne comtesse a bien assez de chagrins, sans celui-là. Le jeune homme dont parlait le More ne s’appelait point Renaud.

Du reste, l’entretien que j’entendis m’apprit peu de chose. On m’envoya deux fois chercher du vin, et il est vraisemblable que l’étranger choisit le moment où j’étais ainsi absente pour placer ses questions les plus importantes.

L’impression que j’ai gardée de lui est pleine de doutes. Vient-il réellement de la part d’un ami malheureux ? Est-ce un agent déguisé de vos nombreux ennemis ? Je ne saurais le dire. S’il s’agissait de moi seule, il me semble que j’aurais confiance en lui.