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que mon pauvre papa ne boit que de l’eau, aussi a-t-il perdu le peu de cervelle que Dieu lui a donnée. Il ne me confie plus ses affaires, et comme il a bien deviné que j’ai surpris çà et là quelque petite chose, il m’a défendu de te voir…

— Moi ! l’interrompit Pola. Pourquoi ?

— Parce que tu dois tout ignorer.

— Mais que se passe-t-il donc ?

— Rien de bon, j’en ai peur.

— Tu m’avais annoncé des nouvelles de ma bien-aimée mère ?

— Des nouvelles ! répéta Mélise en hochant la tête. Il y a du neuf et du vieux. Mais n’allons pas si vite. Je ne sais pas quand je pourrai te revoir, et pendant que je te tiens, je veux vider mon sac. D’abord je suis descendue par la fenêtre, parce qu’on ne peut plus arriver ici par la porte.

— Elle est fermée ?

— Mieux que cela. Elle est condamnée. Ah ! ah ! mon père sait bien qu’avec moi il ne faut pas faire les choses à demi. Ta mère lui a dit : Il ne faut pas que ma fille se puisse douter de ma présence à Paris.

— Ma mère ! à Paris ! s’écria Pola, qui se leva toute droite. Elle qui n’a jamais quitté mon père pendant une heure ! Est-ce que mon père est aussi à Paris ?

— Non, répliqua Mélise. Assieds-toi.

Pola se laissa retomber sur le banc.

Mélise prit ses deux mains qu’elle effleura de ses lèvres.

— Petite sœur, dit-elle d’un ton doux et triste, employant peut-être à dessein ce titre qu’elles se