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duc dans la salle à manger ; me laisseras-tu déjeuner tout seul, traître de Bas-Breton !

Le comte entra, soutenant sa femme radieuse de bonheur.

— Est-ce vrai que c’était elle qui tenait mon intendance, demanda le bon duc, au temps jadis ?

— Elle a toujours été, répondit le comte, elle sera toujours mon intelligence et mon cœur.

— Sarpejeu ! fit le duc, tu m’as montré trois drôles de choses en ta vie, Guezevern, buveur de cidre ; un remède contre la colique, un intendant honnête homme, et une bonne femme. Tu dois savoir où est le merle blanc, hé ?

— Sauf le respect que je vous dois, mes seigneurs et madame, dit ce coquin de Mitraille qui entra, roulant comme une caravelle, j’ai bu le septième et je ne m’en porte pas plus mal ; je suis arrivé à temps pour empêcher un grand malheur. Dans le fossé, là-bas, M. le chevalier était en train de tuer M. le lieutenant de roi, et M. Roger tenait son épée sur la gorge du conseiller Renaud de Saint-Venant : Mathieu Barnabi se sauvait comme il pouvait. J’ai dit : sanguedimoy ! changez, jeunesses ! l’enfant ne peut faire la fin de son parrain ! Alors, c’est M. le chevalier qui a pris Saint-Venant et M. Roger qui a décousu le Gondrin. Tout est donc au mieux. Moi j’ai assommé Barnabi comme un chien enragé. Ils sont morts tous les trois ; que Dieu nous bénisse !

— Que Dieu nous bénisse ! répéta pieusement M. de Vendôme, et qu’il me rende mon gouvernement de Bretagne ! Là-bas, en vendant des pommes on gagne de quoi acheter du vin.