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et pourtant elle ne se plaignait point de son séjour à Paris.

Sans doute que la société de dame Honorée lui tenait lieu abondamment de tous les plaisirs qui enchantent la jeunesse. Dame Honorée était de cet avis-là.

Mais revenons à ce beau matin du mois de juillet 1643 où le clos Pardaillan était tout parfums et tout fleurs. Les corbeilles embaumaient, les clématites et les cytises, grimpant par-dessus le berceau, assiègeaient de leurs pousses envahissantes le logis de la vieille dame, qui semblait un vaste bouquet. Les oiseaux chantaient sous les feuillées, les papillons voletaient parmi les roses.

C’était tout. Nulle créature humaine ne paraissait dans le jardin. La messe de sept heures venait de sonner à la chapelle des Capucines, et dame Honorée, fidèle à ses vieilles coutumes, avait quitté la maison depuis dix minutes au moins, munie de son monumental missel.

Pola, moins matinale, l’avait suivie à cinq minutes d’intervalle, et tout dormait, assurément, dans l’hôtel de Vendôme, où M. le duc, un peu échauffé, n’était rentré qu’au petit jour.

Chose singulière et qui rajeunit tout à coup notre histoire de vingt ans, une voix claire, une voix douce et charmante qui semblait sortir des bosquets, se prit à chanter dans la solitude.

Et cette chanson était celle de notre Éliane, quand elle éveillait maître Pol de Guezevern, endormi par la fatigue et l’orgie.

Après tout, Pola était la fille de notre Éliane, et sans doute qu’on l’avait bercée avec cette