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des greffiers, et des gruyers, et le bailli de Milhau, et M. le sénéchal de Rodez, et des gens de justice, voyez-vous, en voici en voilà, avec des soudards et des archers. Il y a plus de douze sergents, il y a trois massiers avec l’appariteur du prévôt de Sainte-Affrique. N’est-ce pas une chose à voir, dites donc ? Et il est sûr que si elle n’a pas assassiné son mari tous ceux-là s’en retourneront avec le béjaune !

— Mais qui ? s’écria Gaëtan, et quel mari ?

La Cathou le regarda d’un air stupide.

— Madame la comtesse, donc, fit-elle, et M. le comte qu’elle a dans une boîte sous son propre lit !

Gaëtan haussa les épaules avec dédain et la repoussa pour entrer. Elle l’arrêta d’une main robuste.

— Vous savez, dit-elle, dès que nous serons là-dedans, nous ne pourrons plus causer. On ne cause pas dans la chambre de l’aïeul.

Depuis qu’ils étaient au haut de l’échelle, sur l’étroit carré qui précédait la porte à demi désemparée, la grande fille parlait d’une voix contenue, comme si elle eût craint d’être écoutée.

— Que voulez-vous que j’entende plus longtemps toutes ces folies ? s’écria le chevalier.

— Ce ne sont pas des folies, prononça gravement la Cathou. Il y a des choses étonnantes derrière ces grands murs noirs, c’est moi qui vous le dis. Elle est bien riche, mais je ne voudrais pas avoir sa conscience.

— Elle est trop riche ! murmura Gaëtan. Tous ceux qui sont pauvres la jalousent et la détestent.