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la tête nue et semblait demander au grand air un peu de repos pour sa cervelle en fièvre.

Il pensait et il souffrait. Quelque chose le troublait : on eût dit un remords.

Son cheval venait de fournir un vigoureux temps de galop. Il avait de la sueur aux flancs.

À quelques centaines de pas de l’enceinte de Paris, don Estéban s’arrêta et quitta la selle. Il y avait là un bouquet de bois entouré d’une haie. Don Estéban jeta la bride sur le cou de son cheval et dit tout bas :

— Saute, Keis !

D’un bond le cheval fut de l’autre côté de la haie.

Estéban siffla doucement. Le cheval sauta la haie de nouveau et vint lui lécher les mains.

Estéban le baisa sur les yeux et dit encore :

— Saute, Keis !

Cette fois, le noble cheval disparut sous bois et le More prit à grands pas le chemin de la ville, où il entra par la porte la plus proche.

Il n’avait point son burnous blanc ; sa haute taille s’enveloppait dans un manteau de couleur sombre.

Il descendit la rue Saint-Honoré. En arrivant aux environs de l’hôtellerie Saint-Pancrace, il ralentit le pas et releva la tête, interrogeant de loin la façade de la maison. À l’une des plus hautes fenêtres, une main se montra, qui agita un mouchoir. Don Estéban, au lieu de poursuivre son chemin, tourna sur la gauche et prit une ruelle qui longeait le mur d’enceinte de l’hôtel de Vendôme.