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Saint-Pancrace et demanda qu’on l’introduisît auprès de don Estéban. La grosse servante à qui elle s’adressait lui rit au nez sans façon.

— Sa grande barbe et son cuir tanné, dit-elle, ne vous font donc pas peur, mignonne ?

— Non, répondit Mélise, il s’agit d’une affaire de vie ou de mort.

— Une affaire d’amour, plutôt, ma commère. Mais don Estéban va et vient. Il n’a pas couché ici cette nuit.

— Alors je veux voir le chevalier Gaëtan.

— Bon ! un joli blondin, celui-là ! Vous êtes comme le More, à ce qu’il paraît, vous allez et vous venez ?

Cette petite Mélise avait, quand elle voulait, un regard qui clouait la parole aux lèvres des impertinents.

— Bien, bien, demoiselle, dit la servante, vos yeux ne me font pas peur. On ne m’a point donné à garder le chevalier Gaëtan, qui a encore un autre nom, à ce qu’il paraît. Je ne lui veux pas de mal, car il est généreux et beau. Mais on dit qu’il a eu grand tort de faire cette algarade au couvent des Capucines. Le chevalier Gaëtan est obligé de se cacher, maintenant, demoiselle.

Mélise n’était pas riche, et pourtant elle mit une belle pièce blanche dans la main de la servante.

— Oh ! oh ! fit celle-ci, est-ce que vous êtes celle pour qui ils vont se battre ?

— Oui, répondit Mélise à tout hasard, je suis celle pour qui ils vont se battre.

Elle ne savait même pas de qui on parlait.