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qui était grande. De mesure en mesure, il avait fini par vider un broc et se trouvait dans cet état que notre gentille Mélise appelait « la sagesse ».

Et, en vérité, quoi qu’on puisse penser, Mélise n’avait point tout à fait tort.

Mitraille remit son épée au fourreau et regarda d’un air assez débonnaire le More qui marchait droit à lui.

Les pages, valets et soudards qui emplissaient le cabaret se mirent à sourire, disant :

— Le basané fait peur à ce coquin de Mitraille.

— Sanguedimoy ! répliqua celui-ci, vous en a menti par la gorge ! Choisissez les trois meilleurs d’entre vous, et envoyez-les savoir de mes nouvelles.

Le More, en ce moment, lui mettait la main sur l’épaule.

— Il est temps ! dit-il.

Mitraille le regarda de travers.

— Toi, grommela-t-il, du diable si tu n’es pas la bouteille au noir ! Je ne sais pas où je t’ai vu jadis. Je ne peux pas deviner si tu es pour ou contre madame Éliane. Tu m’embarrasses !

— Il est temps ! répéta le More, dont la main plus lourde pesait sur son épaule.

Quelque chose manquait encore à Mitraille, et ce quelque chose était la mesure de vin pleine, qui moussait rouge, sur la table, devant lui. Il la but d’un trait. Quand il l’eut avalée, il essuya sa moustache et se mit sur ses jambes disant :

— À la grâce de Dieu ! s’il ne marche pas droit, il sera toujours temps de lui casser la tête !

Le More tourna aussitôt les talons et se dirigea