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et la ligne rouge de ses paupières clignotait à la lumière du feu.

Il y avait dans ce regard une gratitude plus grande que ne le méritait à coup sûr l’observation de la vieille femme de charge.

Du reste, et nous devons le dire tout d’abord, la plupart des actions de cet homme étaient difficiles à expliquer. On croyait deviner chez lui parfois une marche lente et systématique vers un but mystérieux, mais on ne tardait pas à perdre sa trace, et l’espionnage le plus fin comme le plus obstiné eût été dérouté par sa conduite.

Nul ne songeait d’ailleurs à l’espionner. À quoi bon l’eût-on fait ? Ses fréquentes visites à la maison de M. de Vaunoy, ennemi personnel et acharné des Loups, éloignaient toute idée de connivence avec ces derniers, et cette connivence seule aurait pu donner quelque force à un homme si bas placé dans l’échelle sociale.

Il y avait quinze ou seize ans que Pelo (Pierre) Rouan était venu s’établir dans la forêt de Rennes. Il avait amené avec lui une petite fille au berceau qu’il appelait Marie. Solitaire d’habitude et paraissant fuir la société de ses pareils, il s’était bâti une loge à l’endroit le plus désert de la forêt, avait creusé un four souterrain et faisait depuis lors ce qu’il fallait de charbon pour soutenir son existence et celle de sa fille.

Marie avait pris la taille d’une femme. En grandissant, elle était devenue bien belle, mais elle l’ignorait. Beaucoup prétendront que ces derniers mots renferment une impossibilité flagrante : nous soutenons néanmoins notre dire.