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maître, et pour l’amour que tu as gardé à ton pays. Si tu veux, tu ne me quitteras plus.

Jude toucha respectueusement la main que lui offrait le capitaine.

— Je le voudrais, murmura-t-il en secouant la tête, sur ma parole, je le voudrais, car il y a en vous quelque chose qui rappelle la franche loyauté de Treml. Mais je suis à l’enfant et je suis Breton : ne m’avez-vous point dit que vous venez pour anéantir les derniers restes de la résistance bretonne ?

— Si fait ! quelques centaines de fous furieux. Quand la rébellion se sent faible, vois-tu, elle tourne au brigandage : je viens pour punir des bandits.

Jude réprima un geste de colère.

— De mon temps, murmura-t-il, messieurs de la Frérie bretonne ne méritaient point ce nom.

— C’est vrai : ceux dont tu parles n’étaient que des maniaques entêtés ; mais les Frères bretons sont devenus les Loups.

— Les Loups ? répéta Jude sans comprendre.

— Ils ont eux-mêmes choisi ce sauvage sobriquet. Ce n’est pas la Bretagne, ce sont les Loups que je viens combattre de par l’ordre du roi.

Jude ne fut probablement point persuadé par cette subtile distinction, car il se borna à répondre :

— Je ne sais pas ce que font les Loups, mais ils sont Bretons et vous êtes Français !

— N’en parlons plus ! s’écria gaiement le capitaine. Quant à la question de savoir si je suis Français ou non, c’est plus que je ne puis dire. Bois un coup, mon garçon !